Méditation mercredi 21 avril 2021

Bonjour et bienvenue cordiale à vous qui nous rejoignez pour ce temps de méditation.

Pour commencer
Ruht wohl, extrait de la Passion selon St. Jean (J.-S. Bach)

Evangile de Jean, chapitre 17, v. 13ss

Mais maintenant, Père, je vais à toi, et je parle ainsi pendant que je suis encore dans le monde, afin qu’ils aient en eux-mêmes ma joie, une joie complète. (…)
Je ne te demande pas de les ôter du monde, mais de les garder du mauvais. Ils n’appartiennent pas au monde, comme moi je n’appartiens pas au monde. Fais qu’ils soient entièrement à toi, par le moyen de la vérité, ta parole est la vérité. Je les ai envoyés dans le monde comme tu m’as envoyé dans le monde.

Méditation

Semaine Sainte 2021, mercredi matin.
Le téléphone sonne, c’est Joëlle.
Au fur et à mesure de la conversation, je réalise combien cette amie en a gros sur le coeur.
La mère de Joëlle vit dans un home de la région depuis quelques années.
Joëlle me raconte la nouvelle qu’elle vient d’apprendre :  vendredi prochain, Vendredi Saint, aura lieu dans ce home la « fête du printemps », organisée pour les résident-e-s avec apéritif, accordéon et tout le tralala.
Joëlle est en colère.
Pour elle et sa maman, Vendredi Saint est un jour à part. Lorsque c’était encore possible, mon amie emmenait sa maman au temple pour participer au culte.
Joëlle se sent blessée dans ses valeurs et ses convictions;  elle  s’est adressée au service d’animation, elle a même tenté de joindre la direction du home pour exprimer son malaise, son incompréhension. La fête du printemps à Vendredi Saint !!
Joëlle se sent seule avec sa colère et son impuissance. Elle aimerait prendre soin de sa maman, lui offrir de vivre un moment paisible, recueilli, à Vendredi Saint, mais, actuellement, sa maman ne peut pas sortir du home.
Joëlle avance à contre-courant et prend conscience qu’elle appartient désormais à une minorité qui accorde du sens et de l’importance à certains jours de l’année ; à présent, les convictions religieuses, la foi, c’est du « privé » !

J’ai été touchée par cette situation et j’aimerais dédier à Joëlle cette méditation et la réflexion de Raphaël Picon, ci-dessous.

Il n’y a pas ici l’ébauche d’une solution ou d’un remède-miracle. J’écris ces lignes en communion de pensées : nous en vivons tous-tes de pareilles situations où nous prenons conscience que notre société a évolué vers la privatisation du religieux, des convictions. C’est ainsi.
La nostalgie, un esprit rétrograde ou se poser en victime n’apporteront aucune aide.
Veillons à ce que la montée aux barricades ou au contraire la démission ne soient pas nos seules réponses.
C’est à la créativité et à la liberté intérieure que nous sommes sans cesse appelé-e-s. Il y a un chemin à tracer, un espace à ouvrir, un horizon à discerner, dans le plus profond respect d’autrui, afin d’oser dire « je ». Je crois… j’espère….

Une idée vraie ne plaît pas forcément à tous ! Elle n’en reste pas moins vraie. (…) Les lecteurs des évangiles le savent. Ils y découvrent un Jésus dont la force intérieure bouleverse en profondeur la vie de ceux qu’il rencontre. Mais Jésus ne veut ni plaire ni séduire. Il détonne, il provoque ; il en mourra, cloué sur une croix. Puissance d’amour et de libération, sa prédication comprend néanmoins une part d’impopularité. C’est vrai de ses paroles dures, celles qui annoncent le glaive et non la paix, la haine entre le père et le fils, qui laissent les morts enterrer leurs morts. (…)
Cette impopularité se retrouve aussi dans ce qui nous plaît spontanément dans les évangiles : l’amour des ennemis, l’appel au pardon, l’amour inconditionnel de Dieu. Hitler et Martin Luther King aimés, l’un comme l’autre, par Dieu ?  La prédication de Jésus ne saurait provoquer l’accord de tous. Pas plus qu’elle ne saurait, en chacun de nous, trouver tout notre consentement. Cette résistance nous sauve des adhésions puériles et béates et met en alerte nos capacités de questionnement et de réflexion.
Par sa prédication engagée, Jésus nous libère des séductions et des conformismes, il nous invite à prendre position, à dire « je », il nous entraîne ainsi vers des horizons de pensée et de vie nouveaux et inédits. Il n’appelle pas des amen réflexes et consensuels mais des choix, des engagements, parfois des combats. « Le Christ est d’abord le grand troubleur », disait le théologien catholique du 20ème siècle Henri de Lubac. C’est ainsi qu’il nous sauve. Oui, il nous sauve de ce qui est mortel dans l’existence : l’indifférence, l’uniformité, l’ennui.
(Raphaël Picon, Un Dieu insoumis, éd. Labor et Fides)

Prière

Je ne te demande pas de les ôter du monde, mais de les garder du mauvais… Jean 17, 15

Il sait ce qu’il dit
celui qui prie ainsi pour ses amis

Il entrera sous peu au jardin
où l’attendent et la violence et le silence (…)

Il sait que rien ne lui sera épargné
ni la morsure de la solitude ni la mort très rude

Il faudra tenir sans se perdre dans cette traversée cruciale

Il en va ainsi pour ceux qui entendent
au profond d’eux-mêmes
la brise légère que d’autres pourtant jugent délétère
Ils ont l’oreille habitée d’un appel qui les tient éveillés

Pour eux vivre n’est pas
s’esquiver ou se préserver
encore moins se retirer de la persévérance
à construire l’espérance

Ils vont le front haut dans le vent des jours
exposés aux orages comme aux arcs-en-ciel

Chahutés mais pas effondrés
ils ne savent qu’une chose
cette flamme en eux
qui leur raconte Dieu
(…)
(F. Carrillo, Le Plus-que-Vivant, éd. Labor et Fides)

Bénédiction

Bonne journée à chacun-e !
Que notre Seigneur vous bénisse et vous garde,
sur tous vos chemins…
les chemins larges et faciles,
mais aussi escarpés, solitaires ou à contre-courant !
Amen.

Pour prolonger…
Choral final de la Passion selon St. Jean (J.-S. Bach)

Une chanson pour les jours où nous marchons « à contre courant »… A contre-courant, Valérie Lagrange

Francine Cuche Fuchs, pasteure